Langue et variation

Françoise Gadet
(10-2018)
(revu et corrigé 05-2020)

Pour citer cette notice:
Gadet (F.), 22020, "Langue et variation", in Encyclopédie grammaticale du français,
en ligne: encyclogram.fr


En 1921, Sapir écrivait : « Everyone knows that language is variable » (p. 147). Certes, tout le monde le sait ; mais qu’est-il au juste entendu par « variable » ?

L’apparente évidence d’un savoir partagé n’a pas été propice au questionnement sur l’étude et la théorisation de cette notion de variable. C’est le concept de variation qui dans la période moderne a été en charge d’en rendre compte, mais ce terme apparaît lui aussi difficile à définir. S’il est en effet difficile d’en faire l’économie (et le terme est omniprésent dans la littérature linguistique actuelle), il résiste cependant aux tentatives de définition, au-delà du principe, partagé par tous, selon lequel il n’y a pas de langue sans variation.

En dépit du nombre considérable de publications traitant de façon plus ou moins centrale de variation, le débat est loin d’être clos – et il n’est pas superflu de revenir sur ce que l’on met derrière ce terme toujours d’actualité dans les sciences du langage. Nous aurons ici pour double visée une réflexion épistémologique autour de la notion de variation et une présentation des faits du français (ou des français) qui en relèvent ainsi que des données qui permettent de les approcher.

La première partie de cette notice tentera une définition des termes de la nébuleuse du variable avec des exemples français, à différents niveaux ; la deuxième s’interrogera sur la représentation des faits variables à travers la notion de variété ; et la troisième reviendra sur les tentatives faites pour "expliquer" la variation, en prenant pour pivot le champ-clé que constitue le style.

 


1. Des faits de variation et des façons de les désigner


En première approche, le thème du variable est partie prenante d’un dispositif notionnel : variable et variation ne vont pas sans un ensemble de termes qui impliquent tout d’abord invariant, du fait que tout ne saurait varier dans une langue. Aussi variable en tant qu’adjectif convoque-t-il les notions de variante, variable (en tant que nom), variabilité – voire variété ; en tous cas, il s’oppose à homogène. Ces différentes notions s’avèrent elles aussi peu claires dans leurs emplois courants – et sans doute difficilement définissables (ou délimitables), au-delà d’évidences vagues ou peu problématisées.


1.1. Le variable : une thématique jamais dominante dans l’histoire des sciences du langage

La problématique du variable est présente de façon ancienne dans les études du langage, quoique de façon discrète [Lyons, 1968], avec deux acceptions distinctes : diversité des langues (variation interlinguistique) ; ou présence dans toute langue d’un espace de jeu, de fluctuabilité (variation intralinguistique). C’est ce second sens qui nous retiendra ici ; il fait moins objet de consensus parmi les linguistes que le premier.

L’étude de la variation n’occupe jamais une position dominante dans l’histoire de la discipline, où celle-ci est bien souvent plutôt vue comme une gêne (voir Berruto, 2004, pour qui la grande majorité des linguistes « have more or less systematically sought to eliminate all elements of variation from the linguist’s scope », p. 293) . Elle a toutefois, depuis le début du XIXe siècle et surtout au XXe, retenu l’attention de quelques linguistes : au moins les dialectologues, Humboldt, Schuchardt, Brunot, Sapir et Whorf, les fonctionnalistes. L’œuvre de Saussure peut être regardée comme ambivalente sur ce point : s’il affirme la nature sociale du langage, c’est dans un cadre macrosocial qui n’entre pas dans le détail du fonctionnement des phénomènes concernés. Le Cours de linguistique générale est universellement regardé comme le texte fondateur du structuralisme, toutefois les notes de Saussure lui-même dans les années 1890 sont moins catégoriques : il parle de « fluctuation », et le Cours a retenu un chapitre entier sur la géographie linguistique, où il est question de variation dans le temps et de variété dans l’espace. Les options sont plus univoques chez Meillet (1921), dont les réflexions préfigurent de bien des façons la sociolinguistique moderne, ou chez Frei (1929), dont le texte au titre paradoxal – La Grammaire des fautes – ouvre la porte à l’étude d’usages attestés, en s’intéressant à des phénomènes que l’on dira plus tard relever de la variation.

La variation en tant que phénomène dynamique est souvent couplée au changement, même si les relations entre les deux ne sont ni prévisibles ni automatiques. Comme l’a rappelé un texte considéré comme fondateur de la sociolinguistique américaine moderne (Weinreich et al., 1968), si toute variation n’aboutit pas à un changement, tout changement a été précédé d’usages diversifiés (de variation). D’où les auteurs concluent que l’étude linguistique des phénomènes de variation, organisés selon une « hétérogénéité ordonnée », est indispensable mais pas suffisante, car seule la prise en compte de facteurs dits extra-linguistiques peut conduire à comprendre pourquoi certains changements s’imposeront et d’autres non. La réflexion menée dans ce texte conduit à ébranler le lien souvent posé seulement de façon implicite par beaucoup de linguistes entre structure et homogénéité, entre organisation systémique et invariance, qui a pour effet de situer la variation hors de la structure. Les travaux de Labov (1972 et suivants) contribueront largement à contester cet implicite.

Dans l’histoire des sciences du langage, une césure dans la prise en compte des données se manifeste à partir du début du XIXe siècle, dans les cadres de la linguistique historique et comparative : « le dialecte, le langage populaire, le langage quotidien et familier etc. acquièrent droit de cité dans la linguistique » (Koch & Oesterreicher, 2001 : p. 588). Toutefois un tel élargissement n’a pas été accompli par toutes les théories grammaticales, et on voit encore aujourd’hui chez beaucoup de linguistes les effets d’une terminologie grammaticale peu tournée vers le variable, souvent héritée de la grammaire traditionnelle et se centrant sur le standard et sur l’écrit. Certaines théories, comme la grammaire générative, excluent par projet même l’étude de l’usage réel de locuteurs concrets et situés – même si c’est bien en se réclamant de la grammaire générative que travaillent Dufter & Stark, 2003, Dufter et al., 2009, Stark, 2017, de même que Vinet, 2001, qui use du terme générativiste de « micro-variation ». Berruto (2013) fait partie des sociolinguistes réfléchissant à une « approche intégrative » – voir son bilan de travaux sur la relation entre sociolinguistique et linguistique formelle. Dufter et al. (2009), avec l’objectif de rapprocher les perspectives empiriques et formalistes, discutent trois approches de la variation : fondée sur les paramètres (parameter-based, pour l’essentiel minimaliste), fondée sur les contraintes (constraint-based, comme la théorie de l’optimalité) ou fondée sur l’usage (usage-based, comme les grammaires de construction). Un regain d’intérêt pour les données et donc pour la variation a ainsi été nourri par les linguistiques fondées sur l’usage, qui recouvrent des travaux à différents niveaux linguistiques, partageant des bases empiriques et des perspectives fonctionnalistes, pragmatiques ou communicatives.

Le thème du variable, marginalisé dans la linguistique des années 50 à 80 du XXe siècle, où il était laissé à des sous-disciplines comme la sociolinguistique, semble connaître aujourd’hui un regain d’intérêt. C’est pour une large part un effet de la linguistique de corpus, puisque le recueil de données, notamment orales et spontanées, voire écologiques (produites sans sollicitation de la part du chercheur) conduit à tenir compte des contextes de production, avec des données de sources diversifiées et situées. Ce qui amène à se confronter à la diversité des façons de parler ou d’écrire une langue – et en dernière instance, à reconsidérer la définition du terme langue. Parallèlement (et non sans relation), de nouvelles possibilités techniques pour le stockage de données, leur fouille, leur transcription quand il s’agit d’oral, et leur traitement automatique ont émergé, qui ouvrent la voie vers de nouvelles perspectives méthodologiques.


1.2. Vers une définition – ce que la variation suppose comme conception de la langue

La plupart des travaux sur la variation contournent donc la définition du terme, comme s’il s’agissait d’une évidence… à moins que les difficultés soient telles qu’on ne cherche même plus de définition qui soit minimalement satisfaisante (Gadet, 2004).

Une définition scolaire se contente en général de poser, souvent de façon implicite, une équivalence entre différents modes d’expression, en « différentes façons de dire la même chose » – que Dufter et al., 2009 qualifient de « rough-and-ready definition » (p. 1). Il serait sûrement préférable en effet de préciser les termes renvoyant à la possibilité même de choix ou de sélection : concurrence, compétition, alternance, équivalence, synonymie, identité, indétermination… tout en s’interrogeant sur le niveau auquel interviendrait un tel choix. Dans les options offertes au locuteur, ou dans la latitude présentée par le système de langue ? (voir 3e partie). Dufter & Stark (2003 : p. 81) proposent une définition à travers deux éléments liés par « ou bien » : « plusieurs formes et constructions ayant la même signification » ; « plusieurs réalisations d’un même élément linguistique ». Ce qui est partagé par les deux segments, c’est même, dont on connaît les apories dans les classifications. C’est sur ce point que Lavandera (1978) avait déjà mis en cause le sameness requirement.

C’est quand il y a clairement alternance de formes que le terme variation apparaît le plus adapté, soit selon la figure de la présence/absence (1/0 : ne ou absence de ne), soit dans le rapprochement d’éléments réputés équivalents (X/Y, comme les paradigmes phoniques ou morphologiques : [i] ou [il] pour il devant un verbe commençant par une consonne, je ou j’, me ou m’. Le dispositif variation/variable/variantes s’applique bien au champ phonique, où il a été établi, dans la sociolinguistique variationniste : une variable fait alterner différentes variantes ; ainsi, on dirait que la variable e muet consiste en une alternance entre une variante zéro et une variante [ә]. Le phonique est aussi le seul niveau qui satisfasse sans conteste possible l’expression « différentes façons de dire la même chose ». Il faut donc d’emblée distinguer entre les niveaux, le phonique d’un côté, tous les niveaux significatifs de l’autre – y compris la prosodie, souvent signifiante elle aussi.

Comme l’idée d’invariant sémantique est bien adaptée au champ phonique, c’est aux autres niveaux qu’il faudra tester la force explicative du dispositif conçu autour de la variation. En particulier en syntaxe (voir Coveney, 2002, ou Pierrehumbert, 1994, pour des esquisses de typologies des éléments syntaxiques entrant dans des variations), niveau qu’il est utile d’explorer pour au moins trois raisons : 1) la syntaxe est au cœur de la définition d’une langue, organisation abstraite qu’il faut supposer entre du son et du sens ; 2) c’est un niveau toujours assez peu étudié sous l’angle de la variation ; 3) l’invariant peut toujours y être objet de débat (Lavandera, 1978, Cheshire, 1987, Blanche-Benveniste, 1997b, 2008, Gadet, 2004, 2007, Cerruti, 2011).

Une raison essentielle pour que la syntaxe ait peu été prise en compte parmi les faits de variation tient aux « débats sur la synonymie », que Blanche-Benveniste (1997b) situe dans la lignée de l’héritage de l’École française de linguistique et de Meillet, selon qui « à toute différence de forme correspondait une différence de sens » (p. 20). On pourrait en donner l’exemple de l’actif et du passif, qui globalement offrent le même sens, mais dont la sélection n’est souvent pas indifférente quant à la signification ou à l’attitude du sujet parlant envers son propos, ne serait-ce que par la possibilité d’effacement de l’agent au passif. Une autre raison pourrait être que les phénomènes syntaxiques s’avèrent moins saillants auprès des usagers que le phonique , donc moins susceptibles de faire l’objet d’investissements sociolinguistiques ou sémiotiques. (C'est ainsi que selon Lodge (2009), dans des "données semi-littéraires du XVIIe siècle" (Mazarinades), les traits chargés de dénoter une oralité populaire sont tous 'ordre phonique ou morphologique, jamais syntaxique). Quant au rapport entre variation et changement, Sankoff & Brown (1976) se demandaient si, en se dotant d’une relativisation lors de son processus de complexification, le tok pisin avait vu émerger de nouvelles significations.

Les données s’avèrent ainsi cruciales afin d’observer cette variabilité et de recueillir des faits de variation selon la diversité des usages. Cependant, les réflexions sont assez peu nombreuses sur les données comme sur les corpus, ainsi que sur les modalités de leur obtention, bien que ces dernières ne soient pas sans incidence sur les analyses linguistiques ultérieures.

Outre la sociolinguistique, il y a surtout deux champs qui ont nourri la réflexion sur les données variables : la linguistique historique et la syntaxe de l’oral. Plus la période étudiée est reculée dans le temps, plus la linguistique historique est confrontée aux lacunes de la documentation et à la difficulté d’attester les faits. L’Histoire de la langue, de Brunot (1905-1972), soulignait déjà ce point ; et c’est aussi ce que montrent Ernst (2015), l’ensemble de l’ouvrage d’Aquino et al. (2009) ou Lodge (2009), qui tous rappellent la survivance aléatoire et presque toujours fragmentaire de données historiques qui ne peuvent que laisser entrevoir des traces éparses d’une oralité à jamais disparue – avant des temps, très récents, qui permettent les enregistrements – sans toutefois éviter les pertes. Le second domaine est la syntaxe de l’oral, avec en particulier les travaux de Blanche-Benveniste, une chercheuse particulièrement exigeante sur le traitement des données orales, dont beaucoup de titres comportent les mots variation ou variante.

Il est indispensable de s’appuyer sur des données fiables, attestées, les plus diversifiées possible (voir Bilger, 2008), car il n’y a pas d’intuition fiable sur des faits de variation si on en connaît mal les ressorts et l’extension, en particulier, dans la grande diversité de la francophonie à travers le monde (voir Gadet, Ludwig & Pfänder, 2008, Drescher & Neumann-Holzschuh, 2010). C’est pourquoi cette notice s’appuiera d’une part sur des exemples empruntés à la littérature linguistique, dans les travaux que nous citons (l’orthographe et la transcription originelles sont alors reproduites) ; d’autre part sur des exemples originaux tirés d’un corpus récent orienté vers la collecte d’une langue ordinaire et peu standard : Multicultural Paris French, MPF (voir Gadet, Dir., 2017 ).

On espère ainsi contribuer à montrer à quel point la sélection des données est tout sauf un processus purement illustratif, mais met bien en jeu la conception même de ce qu’est une langue.


1.3. … et quelques exemples concernant le français

Tout ne varie pas dans une langue, c’est même loin d’être le cas : les faits de variation s’avèrent relever de zones et de sous-ensembles limités.

1.3.1. Le niveau phonique

Pour le phonique, les lieux variables classiques sont assez bien répertoriés, en particulier grâce au travail pionnier de Martinet (1945 – voir aussi Léon, 1965, pour un tableau des lieux de variation, Laks, 2002, Detey et al., 2010, pour des attestations dans différents lieux de la francophonie). Cela suppose aussi de s’intéresser à des phénomènes en fonctionnement discret, la variabilité graduelle des voyelles, par exemple, posant d’autres problèmes (voir Kabatek, 2000, pour une réflexion sur les différents phénomènes, selon qu’ils sont appréhendables en dichotomie, en continuum ou en gradation ; Gadet 2007).

On peut énumérer quelques phénomènes dont la plupart ont été observés depuis longtemps (voir par exemple Léon, 1965, qui offre une synthèse, Carton et al., 1983, pour des spécificités régionales en France).

Parmi les phénomènes isolés, on peut citer la distinction entre [a] et [ɑ] (faite ou non), entre les voyelles nasales [ɛ̃] et [œ͂] (distinguées ou non) ; d’autres sons impliquent des prononciations régionales (comme le rapprochement entre [ᴐ̃] et [ɑ̃] dans le Jura ou en Nouvelle-Calédonie…).

Parmi les phénomènes qui émergent dans la chaîne parlée, on citera les liaisons facultatives (effectuées ou non, selon des fréquences diverses) ; le e muet (prononcé ou non, dont la réalisation dépend aussi de la position et du nombre de consonnes environnantes – mais aussi des catégories syntaxiques impliquées) ; les assimilations de sonorité (consécutives ou non à la chute d’un e muet, comme je pense dans le premier cas, et absent pour le second) ; les chutes de consonnes, spécialement liquides, soit en finale de mot dans différents contextes phoniques (j’en veux quat’, quat’cents, quat’avions), soit dans des groupes internes chargés (prononciations de exprès en [esprε] vs [eksprε] vs [eksәprε]… (Voir Léon, 1965).

C’est souvent à la prosodie que peuvent être identifiés les « accents » sociaux ou régionaux (Carton et al., 1983), comme l’accentuation sur la pénultième chez les Suisses ou l’intonation montante-descendante, dite « banlieue » – mais diffusée bien au-delà des banlieues des grandes villes (Paternostro, 2016). Toutefois, la prosodie se plie mal aux représentations en variables.

1.3.2. La grammaire

Il en va différemment pour les plans morphologique et syntaxique. La morphologie apparaît à la fois trop organisée en oppositions ou en paradigmes (masculin/féminin, singulier/pluriel, personnes verbales, pronoms personnels comme jeme - moi, dont les éléments se distinguent par la position ou le cas) et trop codifiée pour laisser place à beaucoup de variation. On peut même se demander si la morphologie est vraiment disponible à la variation, en dehors du morpho-phonologique (je - j'). Un pluriel chevals à côté de chevaux est plutôt regardé comme une faute que comme de la variation. Il n'y a pour le français que très peu de tolérance aux doublons, comme je m’asseois et je m’assieds (clé et clef pour la graphie) – pour lesquels on peut parler de variation acceptée, comme en (1) :

(1)  ce qui se passe ici / ce qu’il se passe ici (exemple de Berrendonner, 1988 : p. 45 ; il faut supposer une prononciation [ki] dans les deux cas)

Quant à la syntaxe (où n’est pas non plus exclue la notion de faute), on doit y distinguer entre syntaxe des catégories, syntaxe de l’énoncé et macrosyntaxe (voir Cappeau & Moreno, 2017). Pour les catégories, certaines alternances sont binaires : présence ou non d’un ne de négation (voir Meisner et al., 2016), alternance entre prépositions comme à et de dans la construction de verbes (continuer à/continuer de, commencer à/commencer de), ou à et chez en (2) ; présence ou non de que derrière des verbes comme dire, penser ou croire, voir (3) où, afin d’éviter une terminologie d’emblée stigmatisante en manque, absence ou omission, on suivra Blanche-Benveniste (2010) qui se contente de parler de « forme longue » (avec que) et « forme courte » (sans) :

(2)  je vais au docteur/chez le docteur (exemples de Blanche-Benveniste, 2008 : p. 58)

(3)  je pense c’est pour ça qu’ils ont fait ce projet en fait (MPF, Anaïs1b, 945)

Mais le traitement en alternance est loin de convenir à tous les faits grammaticaux variables. Le futur simple et le futur périphrastique véhiculent-ils « le même sens » (voir (4), où 4a et 4b sont prononcés à des moments différents) ? :

(4)  (a) le train 7206 entrera en gare voie F
(b) le train 7206 va entrer en gare voie F (exemple de Paul Cappeau cité dans Gadet, 2011 : p. 98)

Et pour ceux des locuteurs qui disposent du passé surcomposé hors subordination temporelle, on ne saurait le dire en alternance avec le passé composé, du fait que le sens n’est pas le même (exemple (5), qui comporte la nuance « recul dans le passé ») :

(5)  c’était un grand-père bonne pâte euh bon sûrement qu’il nous a eu grondés euh mais… (exemple de Carruthers, 1994 : p. 174)

En (6), il serait peu satisfaisant de voir jamais comme un simple équivalent de pas :

(6)  et ce train qui arrive jamais (notation à la volée)

L’hypothèse d’équivalence est encore plus mal adaptée à la syntaxe de l’énoncé (Blanche-Benveniste, 1996, 2010). Ainsi des interrogatives, système particulièrement complexe en français (voir Coveney, 2011  > Notice   pour l’interrogation directe) : parmi les formes d’interrogatives (par inversion, par est-ce que, par intonation), le locuteur a-t-il vraiment et toujours le choix entre les formes ? Sans parler d’autres tournures, peu valorisées par la norme – pour dire le moins, comme (7), ou bien (8), exemple d’interrogative indirecte in situ :

(7)  (a) où c’est qu’ils sont partis ?
(b) où qu’ils sont partis ? (exemples de Coveney, 2012)

(8)  je vois pas c’est où mais je sais c’est quoi. (MPF, Anna17a, 1211)

Il en va de même pour que : l’ensemble de son fonctionnement met en jeu des tendances contraires (possibilité d’effacement et extension des emplois), plus qu’une simple présence/absence. Voir (9), exemple acadien, et (10), exemple parisien, pour des formes courtes, et (11), exemple québécois d’un usage étendu, que l’on rencontre aussi ailleurs en Amérique du nord, et plus largement à travers la francophonie, comme c’est le cas de (12), recueilli à Clermont-Ferrand :

(9)  je vas parler aussi d’une une chanson Angèle Arsenault Marcel fera jouer euh plus tard
(Nouveau-Brunswick, exemple de Wiesmath, 2002 : p. 396 – pas de que devant Marcel, énoncé qui pourrait aussi être influencé par le contact avec l’anglais)

(10)  je suis bien placé pour voir ce genre de vidéos ça fait du bien (MPF, Aristide2b, 2049 – sans pause)

(11)  quand que ça brasse trop, j’ai le mal de mer (Iles de la Madeleine, exemple de Falkert, 2007 : p. 52)

(12)  donc après j’ai travaillé dans un magasin Hechter Newmann + que ça me plaisait pas du tout (CRFP, PRI-003)

Il en va de même pour les relatives (dont on reparlera en 2.1.). Tel est aussi le cas pour les phénomènes de macrosyntaxe (Blanche-Benveniste 1997a, 2010, Berrendonner & Béguelin 2012) comme dislocations, sur lesquelles on reviendra. Cela soulève toujours la question du « même », qu est présente dès le niveau morphologique : le sens demeure-t-il constant si on le dit autrement ? Blanche-Benveniste (2008) conclut sur ce point que « mettre en avant la notion de variante amène à négliger certaines différences sémantiques ou pragmatiques jugées mineures. S’intéresser aux moindres différences sémantiques ou pragmatiques c’est au contraire diminuer l’importance des variantes » (p. 60).

1.3.3. Le lexique et le discours

Quant au lexique, on ne peut s’y satisfaire de la notion scolaire de niveaux de langue (voir plus bas, en 3.2.), qui suppose qu’il y aurait des « doublons » lexicaux, comme livre et bouquin, argent et pognon, maison et baraque… ou des séries allant d’un terme recherché (ou littéraire) à des termes ordinaires, populaires ou vulgaires, comme véhicule, automobile, auto, voiture, tacot, caisse, bagnole, tire, chiotte… À part peut-être quand il y a contraste entre un terme expert (ecchymose) et un terme ordinaire (bleu), ou entre usage standard et usage régional (quatre vingt dix et nonante), on peut douter qu’il y ait de vrais synonymes – il y a là un débat aussi vieux que l’intérêt pour le langage. Il y a ainsi lieu de revenir sur l’expression « le même sens » et l’ensemble du débat sur la synonymie : si la question du sens concerne tous les niveaux au-delà de la phonologie, le lexique incite particulièrement à distinguer entre sens référentiel et sens contextuel (Cerruti, 2011).

Les réflexions sur le style ébranlent ces équivalences supposées (modulo le rapport à la norme – voir Rey, 1972), remises en cause par la prise en compte de l’énonciateur et des modalités d’énonciation : est-ce que aimer et kiffer ont le même sens ? (ce n’est clairement pas le cas de liker, très spécialisé). Aux plans discursif, sémantique et pragmatique, on peut ainsi se demander si l’idée même de variation lexicale revêtirait du sens, bien qu’elle ait pu être défendue (Cerruti, 2011). Voir aussi Béguelin (1997) pour une extension de la notion de variation à certains phénomènes discursifs (les opérations référentielles).

Si la variation constitue bien une propriété dynamique des langues, de toutes les langues, la variabilité du français se signale par son amplitude. La notion de variation est-elle adéquate pour rendre compte des dynamiques ainsi à l’œuvre ? Elle suggère liberté et choix, mais il n’y a pas vraiment choix si le sens diffère et si l’inscription discursive est différente. Or, les faits que l’on vient d’énumérer (ainsi que d’autres) relèvent de fonctionnements divers : dans la relation entre syntaxe et lexique, il est « impossible de traiter les catégories grammaticales, noms, verbes ou adjectifs, comme des catégories homogènes dont tous les éléments seraient interchangeables » (Blanche-Benveniste, 2008 : p. 73). Il est aussi difficile de traiter de façon identique des fonctionnements binaires et des processus continus – on y reviendra en abordant la question du style dans la partie 3.


1.4. Norme, variation, faute.

Les perspectives concernant la variation ont souvent été présentées à travers une opposition entre norme (par définition unique) et faits de variation (offrant du choix à l’usager), en particulier dans les formulations didactiques et les manuels d’introduction.

Mais cette opposition risque de masquer la disparité des perspectives que suppose la concurrence entre une forme normée (valorisée ou variante de prestige) et une (ou plusieurs) qui ne l’est (ne le sont) pas. La variation est de l’ordre d’observations ordinaires, incontournables dès lors que l’on prend en considération des productions effectives, alors que la norme relève d’un ordre sociopolitique, de la prescription et demeure sans relation avec les usages effectifs. C’est aussi, dans sa forme extrême, une spécificité bien française (souvent répandue à travers la francophonie), qui a revêtu un grand poids historique dans l’établissement du standard et la constitution d’idéologies langagières sur le français. C’est ainsi que se construit l’opposition standard vs non standard, étiquette qui, bien qu’elle soit souvent donnée comme moins stigmatisante que populaire, a l’inconvénient de faire du standard un étalon dont les autres formes se démarqueraient. Voir Ploog (2002) pour une critique de ce terme et des conséquences de son emploi pour la description grammaticale ; Milroy & Milroy (1985) pour l’idéologie du standard en général, dont le français constitue un beau fleuron ; Drescher & Neumann-Holzschuh (2010) pour « l’idéologie d’un unilinguisme monoglossique et monocentrique » (p. 10), qui a entre autres pour effet de marginaliser les variétés non hexagonales.

Blanche-Benveniste (2008) rappelle que la standardisation a mobilisé deux types de processus visant à réduire ou à marginaliser la variabilité : 1) écarter des formes « en les traitant comme des variantes illicites » (p. 59) ; 2) « investir du sens dans les moindres différences formelles » (p. 60) – et on pense à Saussure donnant les humains comme des animaux sémiotiques. Elle en donne l’exemple de l’opposition entre eau bénite (domaine religieux) et terre bénie (hors religieux).

Le premier processus aboutit à écarter des formes comme étant des « fautes ». Pourtant, il arrive que le non-standard, loin d’être du « en plus » fautif à conserver à l’écart, permette de dégager une organisation systémique. Ainsi, Blanche-Benveniste (1983) évoque le cas des pronoms en et y après un impératif, comme en (13) :

(13)  (a) donnez-nous-en
(b) chantez-en
(c) manges-en, chantes-y
(d) donne-moi-z’en, emmène moi z’y (exemples de Blanche-Benveniste, 1983 : p. 32 sq.)

À côté de cas comme (13 a) et (13 b), où la prononciation met en jeu une liaison sur nous ou sur -ez, (13 c) apparaît comme une exception, avec un impératif de verbe du premier groupe prenant un s final : il demeure isolé dans le standard, tant qu’il n’est pas rapproché de formes non standard attestées de façon ancienne, comme (13 d), où z’en et z’y pourraient être interprétées comme des variantes postverbales de en et de y. Sans ce z’en et ce z’y, le système est difficilement lisible. Ce z’en a d’ailleurs parfois pu se maintenir dans des variétés « périphériques » conservatrices, comme en (14), relevé à Terre-Neuve, réservé à la construction en faire et peut-être aussi influencé par l’anglais, en tous cas pour la position :

(14)  ma mère me fait manger z’en (exemple de King, 1989 : p. 144 = m’en fait manger)

Compte tenu des différences d’impact aux différents niveaux, la norme est toujours à prendre en compte pour la syntaxe, où elle a pour corollaire la notion de faute, spécialement pour une langue comme le français, tellement marquée par l’idéologie du standard. Blanche-Benveniste (2002) évalue quelques « fautes » régulièrement épinglées dans les grammaires, certaines étant plus particulièrement « typantes », comme la présence d’un que derrière quand, comment ou combien (p. 9). Les jugements en termes de fautes sont moins prégnants pour le phonique (Laks, 2002), où les écarts sont plutôt entendus comme des variantes (ce qui n’exclut pas, loin de là, les jugements de valeur axiologiques). Toutefois, l’un des chapitres de Sauvageot (1972) s’intitule « Les fautes parlées », dont le début concerne la prononciation. Il y traite en particulier de formes qu’il dit « fautive[s] sans appel » (p. 149), comme l’élision de [l] et [r] en finale devant un mot commençant par une consonne ([kat] pour quatre dans quatre cents, qu’il renvoie aux « faubourgs de Paris ». (Ces fautes typantes, chacun peut les situer en des points différents, comme l’évoquent les prescriptions sur le site de l’Académie française, à la rubrique : « on ne dit pas petit déj’ner » !)

Ce que nous venons de présenter invite à ne pas négliger le savoir langagier des usagers sur leurs pratiques, aussi bien quant à leurs usages que quant aux représentations qu’ils s’en font. Mais, outre la difficulté à situer la valeur à accorder aux jugements métalinguistiques spontanés, toutes les écoles dans les sciences du langage n’acceptent pas un tel objectif, on l’a vu et on y reviendra.

Une façon courante de catégoriser les faits de variation consiste à les associer à des ordres « extralinguistiques » dans lesquels ils sont investis (et à les nommer à partir de là), ce qui laisse entendre qu’ils tendraient vers l’homogénéité et la cohérence – et ce qui du même coup justifierait de parler de variétés, notion que l’on va maintenant examiner.

 


La notion de variété: réalité ou abstraction à des fins pratiques?


La notion de variété s’avère elle aussi difficile à définir et fait l’objet d’interrogations de la part de linguistes, au moins depuis Weinreich (1954).


2.1. De la variation aux variétés ? Ou des variétés à la variation ?

Le français offre un exceptionnel terrain d’observation, l’anglais étant la seule langue à connaître davantage de configurations sociohistoriques. L’amplitude des français va aujourd’hui de la pleine vitalité à la quasi-obsolescence (Terre-Neuve, Ouest canadien, Louisiane…) ; à quoi s’ajoutent les français langue seconde (en particulier d’Afrique noire et du Maghreb) – voir Gadet, Ludwig & Pfänder (2008), qui esquissent un panorama « panlectal » des données syntaxiques dans les différents français (cherchant à couvrir tous les français à travers le monde).

Chaudenson (2005) rappelle une particularité de l’histoire du français : à une même époque, au XVIIe siècle, des colons ont quitté la France, les uns vers ce qui deviendra les aires francophones d’Amérique, d’autres vers des îles de l’Océan Indien d’une part, des Caraïbes de l’autre, où apparaîtront des créoles « à base française ». Ce qui constitue une occasion de comparaisons, la diversité étant toutefois encore trop peu documentée dans les corpus disponibles (Gadet, 2013 ; Drescher & Neumann-Holzschuh, 2010, sur l’apport des « variétés non-hexagonales » à la réflexion sur la variation).

Les variétés sont en général conçues en corrélation à des faits « externes » – dénomination qui a l’inconvénient de donner les rapports entre langue et social comme une mise en contact de deux ordres existant préalablement à leur entrée en relation : il y aurait ainsi du social sans langage (voir partie 3, et Hambye, 2017 pour une critique). Elles sont alors dénommées à travers des « dimensions » relevant de l’espace, du temps, de la diversité socioculturelle des locuteurs ou de leurs activités et interactions…

Le flou du terme dimension n’empêche pas son omniprésence à propos de variation : on le trouve par exemple chez Dufter & Stark (2003) ou Krefeld (2015), qui le reprennent de Coseriu. Et il ne semble pas beaucoup discuté – toutefois, mais bien timidement, chez Gadet (2004). Quant aux dénominations de ces dimensions, là où la terminologie de Flydal raffinée par Coseriu décline des termes en dia- dévolus à la langue (qui sont utilisés dans cette notice), les géographique, social, stylistique du variationnisme n’y renvoient que de façon dérivée. Avec l’objectif de faire dialoguer dialectologie et structuralisme, Weinreich (1954) quant à lui parle de diasystem et de variety (ce dernier qualifiant les aspects linguistiques d’un dialect).

De ce découpage dans le réel découle la terminologie de Flydal (1952) – à qui l’on doit les termes architecture variationnelle ou architecture de variétés (Vœlker, 2009). Ce schéma a été revu par Coseriu (entre autres, 1969), dans ce qui, dans la romanistique allemande, deviendra linguistique des variétés ou linguistique variationnelle (Varietätenlinguistik) : dans le diasystème, au diatopique (lieu) et au diastratique (social), Coseriu ajoute le diaphasique (ou diasituationnel). Si, pour lui, la diachronie ne relève pas du diasystème, c’est en droite ligne de l’idée saussurienne que cet ordre échappe à la conscience du sujet parlant.

La notion de variété renvoie à trois perspectives, distinctes mais intriquées (Gadet, 2004, Dufter & Stark, 2003 – et, pour la coïncidence, seulement partielle, entre les trois types de définitions, Kabatek, 2000) :

1) socio-historique : on peut parler de « français canadien » parce qu’existe le Canada, où le français fait partie des langues parlées ;

2) idéologique : les usagers recourent volontiers à des schémas binaires qui reprennent autant le bon sens (nous et les autres) que des dichotomies entretenues et alimentées par les discours scolaires (standard et non standard, bien parler et mal parler, haut et bas de l’échelle sociale). Il y a alors un « français canadien » parce qu’il y a des locuteurs pour s’en réclamer ;

3) linguistique : le « français canadien » se distingue des autres français par les traits linguistiques X ou Y, une organisation Z des traits X ou Y, ou des contraintes Z sur le trait X. Ainsi, comme exemple de contrainte, ça prend sélectionne un objet désignant un laps de temps en français de France (voir (15)), mais il est d’un usage plus large en Acadie – et plus largement en Amérique du nord (voir (16)) :

(15)  ça prend une heure

(16)  ça prend un petit chandail (cité dans Gadet, 2014 : p. 69)

Dans la perspective 3), la plus linguistique (dont on peut douter qu’elle soit tenable jusqu’au bout, comme on le verra), une variété serait idéalement établie soit à partir de traits qu’on ne trouverait pas ailleurs, soit d’une configuration spécifique de traits qui se trouveraient aussi ailleurs. Est-ce possible hors des domaines de la phonie et du lexique ? Et même là, on a souvent fini par rencontrer ailleurs un trait qui avait été considéré dans un premier temps comme typique, le plus souvent d’un lieu. Il existe peu de cas comme (17), où le pronom y, reste d’un ancien neutre, est circonscrit à une vaste zone couvrant au moins Grenoble, Lyon, Saint-Etienne, la Côte d’Or et une partie de la Suisse romande – ce trait suffirait-il à déterminer une variété ? :

(17)  le Beaujolais, j’y aime (cité par Blanche-Benveniste dans plusieurs écrits, qui le reprend du dialectologue de la région franco-provençale Gaston Tuaillon)

Deux approches sont concevables à partir d’un point de vue de système de langue. Selon la plus radicale, une variété regrouperait des traits variables spécifiques ou une organisation spécifique de traits variables : resterait juste à la nommer. Selon une conception plus large, une dénomination non langagière (socio-administrative ou idéologique) sera confortée par des traits linguistiques, dont certains sont emblématiques aux yeux des usagers. D’où des étiquettes : soit termes experts (vernaculaire, français classique, français populaire…) soit termes ordinaires que peuvent à certaines conditions assumer les locuteurs (français de Louisiane, français d’Afrique, langue des jeunes/des banlieues…). L’accord se fait plus aisément sur les dénominations géographiques – il y a d’ailleurs eu des linguistes pour réserver à celles-ci le terme variété (Dufter & Stark, 2003, pour des précisions), le diatopique demeurant singulier (Johnstone, 2004) du fait de la relation des individus à leur territoire. Cet ordre a fait l’objet d’une discipline, la dialectologie, l’une des sources de la sociolinguistique pour les variétés localisées, qui s’est intéressée à la délimitation entre ce qui relève de facteurs idéologiques et géo-politiques vs de facteurs linguistiques. Elle a traité ces derniers comme permettant des conglomérats d’isoglosses, question que la sociolinguistique variationniste a reprise en remplaçant « isoglosses » par « faisceau de traits variables ». Toutefois, les deux perspectives viennent buter sur le même problème, l’hypothèse qu’il y a surtout homogénéité et cohérence, et non instabilité, adaptabilité, fluidité – nous y reviendrons dans la partie 3.

Ainsi, un trait est souvent attribué à une variété et supposé exclu des autres, alors même que le variationnisme a bien établi qu’il était rare voire inexistant qu’un trait soit d’un usage catégorique (utilisé constamment par tous les locuteurs) ou qu’il soit l’apanage d’un locuteur ou d’un type de locuteurs et absent chez d’autres ou les autres (voir une synthèse à ce propos chez Billiez & Buson, 2013). Les corpus de francophonie, bien qu’encore trop peu nombreux, ont bien permis de voir que, hors niveaux phonique et lexical, il n’y avait guère de phénomènes caractéristiques d’une variété et d’une seule (voir Gadet, 2011) : ce n’est ainsi, pour l’essentiel, pas le linguistique qui donne corps à une variété.


2.2. Penser en variétés et les nommer

Attribuer un nom à une variété a pour effet de lui donner corps, au risque de l’essentialiser : nous en prendrons un exemple en syntaxe.

Dans sa Grammaire québécoise, Léard (1995) assortit ses exemples d’étiquettes : « Q » pour « français québécois » ; « F » pour « français standard » ; parfois « F, Q » ; FP pour « français parlé ». Le traitement des relatives (p. 11) conduit à soulever quelques difficultés de sa répartition :

(18)  (a) La personne que je parle (Q)
(b) La personne dont je parle (F)
(c) La personne de laquelle je parle (F)
(d) La personne de qui je parle (F)

Au-delà de la disparité de la série « québécois-standard-parlé », on peut se demander si le partage entre ces formes est vraiment d’ordre diatopique. Y a-t-il beaucoup de Français pour user de (18 b) ou (18 d), et peut-être encore plus de (18 c) ? On n’en rencontre guère d’exemples dans des corpus oraux (sauf dans des conférences ou des émissions de radio). Il se peut que (18 a) soit plus rare en France qu’au Québec (ce qui serait à établir)  ; toutefois, il est loin d’y être inconnu : tout dépend des données. Ainsi, dans MPF, avec un dépouillement manuel de 51 heures, j’en ai relevé 51 occurrences concernant un sujet il ou ils comme en (19) ; auxquelles s’ajoutent 55 cas de pronoms ou de fonctions autres, comme (20) ou (21) :

(19)  il y en a qu’ils utilisent la cafetière mais ils nettoient pas (MPF, Elodie1, 923)

(20)  tous les mots que ça devrait être étudié à l’école (MPF, Anna3, 2813)

(21)  c’est vraiment un établissement scolaire que que j’ai envie de dire que là-bas c’était un zoo pour moi (MPF, Anaïs1a, 588)

Certes, cela n’en fait qu’à peine plus de 2 par heure en moyenne. Mais la récurrence des phénomènes syntaxiques est moindre que celle des faits phoniques, et les relatives, standard ou non, ne sont pas fréquentes en usage ordinaire. C’est bien pourquoi il faut des corpus longs.

Ainsi, à vouloir instaurer des frontières de variétés, Léard néglige ce qui est partagé et creuse l’écart entre des objets qui divergent d’autant plus qu’ils ont été forgés, surtout pour « F » dont les exemples fleurent le construit. Or il y a pour qualifier cette variation des hypothèses autres que diatopiques, avec les oppositions oral/écrit, spontané/préparé, immédiat/distance… ou différentes combinaisons de ces paramètres (voir Koch & Oesterreicher, 2001). En effet des énoncés comme (19), (20) ou (21) se rencontrent un peu partout dans la francophonie (compte tenu des circonstances de production). Les exemples (21) et (22 a) – ce dernier sous-spécifié par rapport au construit (22 b) mais sans doute adapté à la situation où il est énoncé – pourraient ainsi illustrer une ressource panfrancophone de « l’immédiat communicatif » :

(22)  (a) la serviette que je me suis essuyé (exemple de Deulofeu, 1983 : p. 122)
(b) la serviette avec laquelle je me suis essuyé (exemple construit)

Bauche (1920) donnait la série reproduite en (23) comme caractéristique du « langage populaire » (parisien) :

(23)  L’endroit que je l’ai rencontré.
La rue qu’il y a tant de bistros (exemples de Bauche, 1920 : p. 118)

On est ainsi amené à revenir sur le mode de définition que l’on a dit « linguistique » ; a-t-il jamais été pratiqué ? Jusqu’où est-il pratiquable ? Les variétés postulées par les chercheurs ne sont-elles pas pensées telles sur la base de critères historico-sociaux, géographiques et/ou idéologiques, et non linguistiques ? Les variétés supposées ne sont-elles pas surtout la projection sur la langue de catégorisations qui lui sont extérieures ? En tous cas, la notion ne peut être utilisée qu’en en reconnaissant le caractère abstrait (Berruto, 2018, passe en revue les objections qui ont été apportées à la notion, pour leur opposer ses propres contre-objections).


2.3. Des spécifications très volatiles

À côté de faits localisés (ou supposés localisables), tout ce qui est lié à l’oralité ne saurait être attribué à une ou plusieurs variété(s).

La négation en pas seul  > Notice   est souvent donnée comme un trait moderne, où V pas serait en passe de se généraliser – sans être obligatoire, la norme ralentissant l’érosion de ne . Pourtant, c’est du XVIIIe siècle que provient (24), relevé dans un espace inhabituel de documentation historique, le journal du médecin Héroard, qui cite des propos rapportés du futur roi Louis XIII enfant en usage ordinaire – des données dont on ne dispose que rarement à date ancienne (voir aussi Ernst, 2015, qui donne une liste de ces lieux inhabituels, p. 76-77) :

(24)  he maman me done pas le fouet (exemple de Ernst, 1985, p. 357)

En diatopie, le pronom ça désignant un animé humain spécifique n’est généralement pas considéré comme relevant du français de France, et (25) provient d’un corpus de Louisiane :

(25)  ça parle en anglais (exemple de Stäbler, 1995 : p. 60)

Or, ce trait se trouve aussi dans d’autres français hors de France, et il n’est pas inconnu en France : MPF nous a fourni 34 occurrences de ça animé humain spécifique dans les 51 premières heures dépouillées, comme (26) qui, en contexte, ne peut s'entendre que comme spécifique :

(26)  C’est que ça a parlé de toi avec tout le monde (MPF, Elodie4, 328)

La locutrice de (26) vise sans nul doute un effet spécifique en employant ça et non pas elle, car elle dispose forcément des deux formes.

La tentation est grande d’exprimer l’alternance en recourant à des expressions comme « à la place de » et « au lieu de », comme le font Dufter & Stark (2003) : 11 de leurs 14 exemples de phénomènes d’immédiat sont exposés à l’aide de « au lieu de » (p. 93-94). Même s’il ne s’agit pour eux que de lister des exemples, le risque est d’ériger le standard en position privilégiée et les vernaculaires en position dérivée – ce qui ne se justifie pas linguistiquement.

On illustrera avec le subjonctif le fait que les choses sont plus complexes. Si l’on ne regarde que sa présence/absence (soit X, soit Y), le subjonctif présent alternant avec l’indicatif répondrait au schéma « X au lieu de Y ». On considère souvent que l’Amérique du nord est à la pointe de la raréfaction du subjonctif (bien attestée à Terre-Neuve ou en Louisiane, cas de (27))… Mais on trouve aussi des indicatifs à Paris, en tous cas dans MPF (voir (28)). Bauche donnait ce trait comme populaire (parisien) – voir (29), et Frei (1929) en donnait lui aussi des exemples :

(27)  moi je souhaite que ça vient pas (exemple de Stäbler, 1995 : p. 56)

(28)  Suffit juste que la chanson elle part et puis je m’en rappellerai (MPF, Aristide2a, 1309)

(29)  tu veux que je viens (exemple de Bauche, 1920 : p. 124)

Donc, ni localisation ni innovation, mais bien le problème de situer le phénomène grammatical : est-ce une variation morphologique (extension du mode de flexion du 1er groupe) ou une variation syntaxique (les verbes vus comme sélectionnant l’indicatif) ? De plus, le subjonctif révèle des tendances opposées : raréfaction, même dans les positions les plus conservatrices, derrière (il) faut que, bien que, pour que ou vouloir ; mais aussi surmarquage comme en (30). Ce surmarquage, peu visible/audible, vu le peu de verbes morphologiquement concernés, est rare mais il n’apparaît pas vraiment localisable (voir (31)), même s’il se peut qu’il soit plus fréquent dans certaines aires de la francophonie :

(30)  il faut que quand je rentre dans la cour faut que je la voye elle en premier (MPF, Baligh2, 278)

(31)  Je crois pas qu’a seye de même (Nouvelle-Ecosse, cité par Neumann-Holzschuh, 2005, p. 128 = qu’elle soit comme ça)

Ainsi, dès que l’on élargit l’empan des données, le paysage variationnel se complexifie et les traits que l’on a cru pouvoir spécifier se banalisent. Et rares sont les faits syntaxiques spécifiques, comme (32), relevé au Québec et à ma connaissance inconnu en France

(32)  Avoir su, je serais venu plus tôt (exemple de Léard, 1995, p. 5 = si j’avais su)

Mais la plupart des traits prétendument spécifiants, plus fréquents dans l’immédiat communicatif (Koch & Oesterreicher, 2001), l’ordinaire et le spontané, échappent à l’intuition du linguiste comme à beaucoup de corpus. C’est pour qualifier ces données sans les surspécifier que Chaudenson (1998) parle d’usages « marginaux » - terme qui court toutefois le risque de laisser entendre que la variation serait un phénomène dérivé.


2.4. De la diversité dans les variétés

L’idée de variété est aussi fragilisée par les diverses modalités de découpage de l’espace : français nord-américain, canadien, acadien, néo-écossais, de la Baie Sainte-Marie, de Grosses-Coques…, tous ces termes correspondent à un territoire de recueil.

Prenons l’exemple d’une « variété » géographiquement identifiable bien que multi-sites : l’acadien (voir Wiesmath, 2002, Neumann-Holzschuh, 2009, Gadet, 2014). Neumann-Holzschuh & Wiesmath (2006) cherchent à évaluer la distance inter-systémique de différentes variétés de la diaspora acadienne sur la base de 6 traits réputés typiques du français acadien (en (33), des exemples de Petras provenant de Nouvelle-Écosse, et un de Péronnet, du sud-est du Nouveau-Brunswick) :

(33)  (a) quoi-ce que le portrait ressemble là pour l’avenir (p. 59)

(b) il avont pris le temps de venir partager leurs idées avec nous-autres (p. 139 = ils ont)

(c) ma guitare h’allons chanter (p. 59 = je vais)

(d) faulit qu’a faisit de quoi (Péronnet, 1995, p. 417 = il fallait qu’elle fît quelque chose)

(e) Murielle et Germaine m’appellirent, vinrent icitte pour me voir (p. 77)

(f) t’as rinque besoin y a point d’inscription (p. 59 = besoin de rien)

Ces traits conservateurs sont aussi attestés dans d’autres lieux du Canada (Péronnet, 1995, pour l’Acadie du Nouveau-Brunswick), et bien au-delà : voir (34), à rapprocher de (33 f) :

(34)  j’en ai point trouvé (cité par Blanche-Benveniste, 1997b, p. 22, qui reprend un exemple de Tuaillon en zone franco-provençale)

Si la qualification d’acadien a un sens, elle résiderait donc dans la fréquence et le cumul : plus que de traits typiques, Neumann-Holzschuh & Wiesmath parlent de « continuum d’acadianité », différentes zones d’Acadie apparaissant, selon le trait, plus conservatrices ou plus « avancées » . Le tableau 1 oblige ainsi à supposer des sous-variétés dans une variété : où dès lors arrêter le découpage ? :

  Louisiane Nouveau-
Brunswick
Terre-
Neuve
Nouvelle-
Ecosse ouest
Nouvelle-
Ecosse est
Quoi interrogatif +/0 + + + +
Ils V-ont +/0 + + + +
Je V-ons +/0 +/0 + + +
Subj. impft 0 +/0 +/0 + +
Passé simple 0 0 0 + +
(Ne)...point 0 0 0 0 +

Tableau 1 : Continuum d’acadianité, selon Neumann-Holzschuh & Wiestmath (2006)
[0 = on ne trouve pas le trait ; + on le trouve « souvent » ; 0/+ on le trouve « partiellement »]

Cette présentation (voir aussi Gadet, 2014, qui discute la notion de variété à partir de l’acadien) rend manifestes les limites d’une cartographie des faits langagiers variables . De plus, entre « souvent » et « partiellement », la gamme est vaste et les frontières fragiles, les usages non standard ou conservateurs n’étant pas plus catégoriques que les autres.


2.5. Variation et contact de langues

Les faits de langue variables sont couramment traités à l’intérieur d’une langue à la fois, sans que soient pris en compte de possibles effets de ce que les locuteurs ne vivent pas souvent en autarcie linguistique ; ou bien, au contraire, tout écart est attribué au contact dès lors qu’il a été relevé dans une zone où cohabitent plusieurs langues. Or, dans la francophonie, le français est « en contact » à peu près partout, et la plupart du temps en position défavorable ou minorée (voir Gadet & Ludwig, 2015). Au-delà d’alternances codiques avérées, il faut donc faire le partage, parmi les phénomènes variables, entre faits interprétables comme effets du contact et faits à comprendre plutôt comme relevant du français, conservateurs ou innovateurs.

C’est une telle question que soulève Neumann-Holzschuh (2009) sur l’acadien. Elle discute de possibles influences de l’anglais, en distinguant 3 cas : 1) une motivation à la fois interne et externe, où l’anglais joue un rôle direct (comme en (35), relevé dans un territoire où l’anglais est omni-présent) ; 2) des copies sémantiques induites par le contact (calque, réplication lexicale) ; 3) des emprunts lexicaux, qui peuvent induire des réanalyses, aux plans lexical, syntaxique, sémantique, pragmatique. Dans d’autres cas, il vaut mieux penser à des phénomènes internes au français, comme en (36), que l’on rencontre aussi dans des contextes où l’anglais ne peut être en cause (voir (37)) : il s’agit d’effets de principes généraux sur lesquels on reviendra, comme quand l’auxiliaire avoir se généralise :

(35)  Tu connais pas la femme que je te parle de (Ile du Prince Édouard, cité par Neumann-Holzschuh, 2009 : p. 55)

(36)  dans un sens quand elle a parti, ça m’a fait plus de peine que quand mon père est parti (Montréal, cité par Sankoff & Thibault, 1977 : p. 94)

(37)  j’ai resté soixante-dix jours au lit (Provence, cité par Blanche-Benveniste, 1977 : p. 105 – repris dans 1997b)

Toutefois, un processus interne au français n’exclut pas l’influence convergente d’un contexte anglophone, par exemple pour l’absence de que (voir Wiesmath, 2002). Et un parler comme le chiac montre que la frontière peut être mince entre emprunt et réanalyse : en (38), le back emprunté à l’anglais vient occuper la place qui serait celle du préfixe re- en français :

(38)  I m’a back callé la même soirée (exemple de Perrot, 1995 : p. 170 = il m’a rappelé)

Neumann-Holzschuh (2009) souligne de son côté qu’il n’est pas toujours aisé de faire le partage entre influence directe et processus interne, les deux étant possibles en (39) :

(39)  il y avait une femme qui m’a demandé pour écrire quelque chose (Nouvelle-Écosse, cité par Neumann-Holzschuh, 2009 : p. 57)

Mougeon et al. (2005), sur le français de l’Ontario, présentent un diagnostic à partir d’un raisonnement en 4 points. Deux critères sont internes : a) y a-t-il un trait équivalent dans l’autre langue ? b) le trait innovant peut-il constituer une régularisation analogique ? Les deux autres sont externes : c) qu’en est-il dans d’autres variétés de la même langue (avec contact intense, faible ou inexistant) ? et d) quels locuteurs sont concernés dans la communauté ? Ces 4 critères permettent d’établir une grille fine et de ne pas formuler de conclusion hâtive.


2.6. La variabilité des investissements : allocation/réallocation de variantes

Plusieurs linguistes ont rapproché les différents faits de variation, comme Haugen (1972). On trouve la même idée d’un stock de variantes opportunément investies par les usagers de diverses significations d’ordre social ou sémiotique chez Berrendonner (1988) avec la notion de « matériau variationnel », dans le « feature pool » de Mufwene (2001) ou dans l’idée d’une « enveloppe » des faits de variation de tous ordres chez Coveney (2011) – aucun de ces auteurs ne citant Haugen. L’idée partagée par ces auteurs est que variation et investissement des variantes sont deux choses distinctes.

La littérature grammaticale et philologique est parsemée de remarques montrant que, en large part, ce sont les mêmes traits linguistiques qui sont en jeu dans différents ordres de variation, dont celle liée au changement diachronique. Les réallocations de variantes d’un ordre à un autre sont des constantes, les investissements de faits de variation ne connaissant pas de frontières étanches. Les faits linguistiques ne sont ainsi pas dévolus à un ordre et les variétés sont des abstractions dérivées, sans qu’il y ait association fixée entre un fait variable (ou un ensemble de faits variables) et une variété donnée. Le matériau variationnel est donc disponible pour être investi dans différentes significations sociales.

L’histoire de la langue atteste que des formes désormais regardées comme hors de la norme ont jadis ou naguère pu relever du français central et qu’il y a donc eu réinvestissement. Ainsi, ce commentaire de Brunot & Bruneau (1949) à propos des verbes impersonnels sans il :

« La langue populaire conserve d’anciennes façons de parler : ‘fallait pas qu’i y aille’, ‘faut pas s’en faire’, etc., la connotation ‘conservateur’ ayant peu à peu laissé place à une évaluation ‘populaire’ » (p. 471)

Aujourd’hui, on classerait sans doute ces formes comme simplement ordinaires, selon un investissement plus diaphasique que diastratique. L’exemple (11) ci-dessus montrait un trait jugé populaire en France, mais qui est plutôt conservateur au Québec :

(11)  quand que ça brasse trop, j’ai le mal de mer (Iles de la Madeleine, exemple de Falkert, 2007 : p. 52)

Les périphrases verbales montrent de nombreux exemples de formes jadis « hexagonales » désormais devenues régionales (voir (40)). Féral 1998 rapproche des exemples recueillis au Cameroun de formes qui ne sont pas ignorées des variétés hexagonales mais qui y revêtent des statuts spécifiques (régional, populaire, oral, enfantin…) ou une moindre fréquence : ainsi de oui/non en réponse à une interro-négative, ou de l’absence d’objet après un verbe transitif… (voir exemples (41) et (42)) :

(40)  maman est qui m’apprend à faire de la tresse (exemple de Saint-Barthélémy, cité par Pusch, 2003 : p. 188)

(41)  – Vous avez un enfant ?
– Non monsieur
– Vous n’avez pas d’enfant ?
Oui monsieur (exemple camerounais de Féral, 1998 : p. 507)

(42)  Mercredi, je n’en ai pas pris du tout mais jeudi j’ai pris (exemple camerounais de Féral, 1998 : p. 505)

On peut y ajouter le postposé (Ludwig & Pfänder (2003) tirent parti de la forte saillance de ce pour souligner le rôle qu’il jouera dans les créoles (en particulier, guadeloupéen) :

(43)  pas capable de passer pis voir ces pauvres personnes , ces pauvres vieux qui étaient capables de marcher pis qui guettaient voir s’y étaient pour avoir de la visite, qui se sentaient seuls (exemple de Ludwig & Pfänder, 2003 : p. 273, dit « canadien »)

(44)  Tanti faut filmer lui/ qui vient là-bas a un gaz voilà filmer lui qui vient (cité par Ludwig & Pfänder, 2003 : p. 274, exemple d’Abidjan emprunté à Ploog)

Plutôt que dans une liste de traits variables, c’est au niveau de processus sous-jacents que Chaudenson (1998) cherche des constantes, potentiellement panlectales : « Il est frappant de voir comment la variation du français se fait, de façon permanente, quels que soient les temps et les lieux, selon des processus constants » (p. 164). Ainsi, Chaudenson et al. (1993) vont distinguer entre faits variables intrasystémiques (« internes » dans des « aires de variabilité », effets d’analogie ou de restructuration), extrasystémiques (« externes ») et intersystémiques (liés au contact).

Le lien posé entre variation et variété apparaît difficile à soutenir linguistiquement autrement que comme une abstraction (Berruto, 2018). Il entraîne aussi deux effets, qui ne sont ni souhaités ni souhaitables : 1) présupposer de l’homogénéité (qui reproduit celle qui est en général prêtée à langue) ; 2) précatégoriser les productions et partant leurs locuteurs, au risque de les essentialiser. Ainsi derrière les dénominations expertes d’ancrage externe (topolecte, sociolecte, ethnolecte…) se profile l’idée qu’il faudrait de l’homogène pour qu’un idiome fonctionne (voir Weinreich et al., 1968, pour une critique de ce postulat qui demeure implicite chez beaucoup de linguistes). Quant à l’essentialisation, elle revient à laisser de côté la fluidité et l’hétérogénéité inhérente aux façons de parler de tous les locuteurs – un fait pourtant incontournable auquel on va venir maintenant.

 


3. Pourquoi les langues manifestent-elles de la variation ?


La plupart des linguistes se donnent pour objectif d’étude les systèmes de langue et non les pratiques langagières effectives, bien que celles-ci ne soient pas étrangères au fonctionnement de la variation et donc du système.


3.1. Une tension dans les théories linguistiques : orientation vers le système ou vers les producteurs de langue

Au-delà du constat, sur lequel ils s’accordent aisément, qu’il n’existe pas de langue homogène et monotone (qui soit parlée toujours de la même façon par tous ses locuteurs), les linguistes divergent quant aux fondements de la variabilité : le système de la langue ou bien la diversité des utilisateurs et des utilisations.

Les héritiers du structuralisme ont longtemps négligé la variation en se centrant sur l’invariant, tout en la regardant soit comme un épiphénomène soit comme un obstacle à la lisibilité du système ) – avant que ne soit affinée la prise en compte des potentialités structurelles des systèmes. De même, la grammaire générative, comme le formule Laks (2013), « rightly rejects in principle the variable data of usage and chooses to found its reasoning on corpora of examples created thanks to grammaticality judgements » (p. 35) : il s’agit bien là d’une position concertée, reposant sur l’hypothèse du locuteur idéal. A l’exception de quelques travaux évoqués en première partie, c’est de façon récente et toujours sans définition précise que la variation a été adoptée par des syntacticiens formalistes, comme Zribi-Hertz (2011), qui conçoit un modèle « diglossique » du français – pour des critiques, portant surtout sur la qualité des données et sur ce qui est supposé de l’agent-producteur, voir Coveney (2011), Billiez & Buson (2013).

Il en va autrement chez les sociolinguistes aux yeux desquels la figure d’un porteur de langue situé (producteur et récepteur, locuteur ou scripteur, inscrit dans le temps et dans l’espace) est cruciale. Toutefois, chez ces derniers aussi, il y a deux manières de concevoir la variation, que l’on peut présenter en repartant du schéma synthétique de Berruto (2017) :

  Orientation vers le système Orientation vers le locuteur
Principe de base La variation comme reflet
de l'expression du social
La variation comme produit
de l'activité du locuteur
Concepts fondamentaux Communauté, corrélations
Variables, variantes
Variétés
Représentations
La parole comme acte d'identité
Choix
Objectifs Décrire les formes et le sens
Concevoir la variation comme
moyen d'assurer les besoins
communicatifs d'une société
&Comprendre comment les
locuteurs mettent en oeuvre des
ressources linguistiques pour
produire du sens
Catégories d'analyse Surtout linguistiques Sociales, biographiques
Perspective Essentialiste Constructiviste

Tableau 2 : Deux conceptions de la variation en sociolinguistique (adapté de Berruto 2017)

Cette double orientation dans les sciences du langage n’est pas sans rappeler des oppositions qui ont historiquement contribué à structurer la diversité du champ des linguistes : conceptions formalisantes vs sociohistorisantes, ou primat accordé aux formes (formalisme) vs aux fonctions (fonctionalisme) – voir Simone (1991). Toutefois, chez les sociolinguistes, on peut déceler un paradoxe déjà pointé par Weinreich (1954). Tout en concevant en général la variation comme un phénomène qui concerne le système de langue, ils l’abordent le plus souvent à travers des étiquettes extralinguistiques en parlant de « variétés » (voir Berruto, 2017 et 2018) ; ils risquent ainsi de retrouver des positions qui renvoient la variation à des facteurs externes. Les deux approches ont des effets divergents quant à la conception de l’objet de la linguistique.

La conception en termes de système est illustrée par le variationnisme. Dans Weinreich et al. (1968 : p. 100), l’un des textes fondateurs de ce courant, la variation est définie comme « an object having ordered heterogeneity » ; c’est ici clairement de système qu’il s’agit. Aussi est-ce sur le postulat que la variation peut (ou doit) être représentée dans la grammaire (modélisée) que repose l’œuvre de Labov (entre autres : 1972, 1994, 2001). Pour lui, le sociolinguiste a pour objectif de comprendre le fonctionnement d’un système variable, et la variation est un phénomène de langue susceptible d’être corrélé à des facteurs extralinguistiques.

Cela conduit de fait à prolonger l’approche structuraliste en ouvrant le système aux données de variation, avec un fondement qui demeure linguistique. En parallèle aux règles de grammaire, les variationnistes ont recouru, surtout en phonologie et en morphologie, à des « règles variables » (voir Dittmar, 2010, et Berruto, 2013, sur l’intérêt pour la sociolinguistique de se confronter aux théories formelles), représentant les faits de variation selon une hiérarchie de valeurs de différents facteurs, linguistiques, situationnels, sociaux, dans des échelles de probabilité. L’évaluation du poids des facteurs conduit par exemple Coveney (2002) à montrer qu’un sujet groupe nominal (et d’autant plus que le groupe est plus long) rend plus vraisemblable la présence d’un ne de négation que ne le fait un sujet clitique (et surtout ce, tu ou je) – voir aussi Meisner et al. (2016)  > Notice   . Parmi les facteurs situationnels, l’un des plus actifs est ce dont il est parlé, comme l’avait déjà indiqué Moreau (1986). Mais le fait de mettre ainsi le social en relation avec des facteurs linguistiques laisse entendre que le social et le langagier sont deux ordres autonomes existant préalablement, entrant en rapport dans une corrélation dont le ressort peut être d’ordre sémiotique ou sociodémographique. Voir les articles de Chambers & Schilling (2013, ed.) pour des synthèses sur différents aspects sociaux ; Romaine (1984), Gadet (2004), Hambye (2017) pour des critiques sur les corrélations externes comme mode explicatif.

Dans la perspective orientée vers le locuteur, au contraire, l’objectif est d’explorer ce que fait l’usager avec le langage, les enjeux qu’il y met, les ressources qu’il y trouve pour constituer son propre répertoire langagier. La variation est alors entendue comme un phénomène sémiotique ou sociolangagier large, avec des manifestations linguistiques. Les agents producteurs-récepteurs de discours sont mis au centre de la théorisation, leurs productions discursives sont regardées comme résultant de leurs activités diverses, toujours situées et contextualisées, sans souci particulier d’association à des macro-catégories sociodémographiques.

C’est d’ailleurs chez des anthropologues du langage que ce point de vue a été initié : ainsi, Woolard (1985) met en avant les agents producteurs de discours, leurs répertoires et leurs façons souples d’en user. Du fait qu’il n’y a pas deux locuteurs pour parler toujours de la même façon et qu’un même locuteur ne parle pas constamment de façon semblable (deux apports décisifs du variationnisme), elle assigne pour objectif à une théorie de la variation de comprendre, sinon d’expliquer, pourquoi les gens parlent comme ils le font au moment où ils le font (« why people talk the way they do », 1985 : p. 738). On verra comment ce point de vue croise d’autres approches, conçues davantage dans la linguistique.


3.2. Une clef pour la variation : le style

Halliday (1978) n’opposait que deux types de variations : according to user (des individus différents, relevant de lieux ou d’époques différentes, ayant des caractéristiques sociales différentes) et according to use, où il s’agit de distinguer entre les façons de parler d’un même individu, dans différentes circonstances et avec différents interlocuteurs.

Le diaphasique peut ainsi être regardé comme un ordre à part. C’est l’ordre le plus difficile à documenter, du fait qu’il supposerait de suivre un témoin dans les différentes interactions qu’il traverse. C’est aussi l’ordre où il est le plus difficile de nommer les produits langagiers. On n’y parle donc pas de variétés, au-delà de catégories stéréotypées ou de dichotomies simplifiées qui se soucient peu de données réelles, comme c’est le cas dans les manuels scolaires, qui s’appuient le plus souvent sur des données construites, stéréotypées ou aléatoires – ils ne sont d’ailleurs pas les seuls (Billiez & Buson, 2013, Coveney, 2011, pour des critiques).

3.2.1. Diamésie et diaphasie : oral/écrit dans la variation

Il y aurait toutefois un autre candidat à la spécificité intra-individuelle : l’ordre de l’opposition oral/écrit, que certains ont nommée diamésie, terme popularisé par Berruto (en particulier, 1987-2012). C’est le romaniste allemand Ludwig Söll (1974) qui a introduit la distinction entre aspects physiques et conceptionnels dans les deux ordres, qui débouchera chez Koch & Oesterreicher (2001, pour une formulation aboutie) sur l’opposition entre immédiat (ou proximité) et distance (Sprache der Nähe, Sprache der Distanz), qui ne correspond qu’en partie à l’opposition oral/écrit (voir Gadet, 2017 b sur la relation entre oral/écrit et proximité/distance).

Selon Koch & Oesterreicher, les situations communicatives peuvent être analysées selon des paramètres pour la plupart organisés selon des polarités, qui transcendent l’opposition oral/écrit :

① Communication privée
② Interlocuteur intime
③ Emotionalité forte
④ Ancrage actionnel et situationnel
⑤ Ancrage référentiel dans la situation
⑥ Coprésence spatio-temporelle
⑦ Coopération communicative intense
⑧ Dialogue
⑨ Communication spontanée
⑩ Liberté thématique
etc.
Communication publique ① 
Interlocuteur inconnu ② 
Emotionalité faible ③ 
Détachement actionnel et situationnel ④ 
Détachement référentiel de la situation ⑤ 
Séparation spatio-temporelle ⑥ 
Coopération communicative minime ⑦ 
Monologue ⑧ 
Communication préparée ⑨ 
Fixation thématique ⑩ 
etc.

Tableau 3 : Les paramètres de immédiat/distance, selon Koch & Oesterreicher, 2001

Ces paramètres jouent un rôle fondamental dans le style tout autant que dans l’opposition oral/écrit. Si, en sociolinguistique, c’est surtout à l’oral qu’a été étudiée la variation, l’écrit est loin d’en être exempt (voir Béguelin, 1998, sur oral/écrit ; Schlieben-Lange, 1998, Martineau, 2013, ou Ernst, 2015, sur ce que les graphies de scripteurs malhabiles ou peu lettrés révèlent de leur conception de la langue ; Ernst, 2003, sur leur conception de la textualité).

La variation diamésique se trouverait particulièrement illustrée dans les graphies non conventionnelles de la Communication médiée par ordinateur (SMS, chats, messages électroniques…) : voir Wüest, 2009, Gadet, 2008, Stark, 2015, Béguelin, 2012, Krefeld, 2015, sur ce que les nouvelles technologies font bouger dans les rapports entre les deux ordres. Mais le débat reste vif pour établir s’il s’agit bien d’un ordre autonome quand, pour d’autres, oral/écrit est l’une des composantes du diaphasique (c’est le cas chez Gadet, 2017 b).

Mais, quelle que soit la façon dont on le classifie, il s’agit bien des potentialités d’un même locuteur, et ce sont les propriétés du répertoire d’un producteur unique qui sont à explorer, en particulier les qualités de cohérence entre phénomènes et de saillance de ces derniers dans les productions. Pour explorer ces deux propriétés, des données situées réelles vont s’avérer cruciales.

3.2.2. Style et cohérence

L’étude du diaphasique a établi qu’il n’est aucun locuteur pour recourir toujours à de mêmes formulations : il n’y a pas de locuteur mono-style – ce que Sauvageot (1972) prenait en compte en parlant du « caractère composite du français parlé » (p. 177) –, voir aussi Bilger & Cappeau (2004) sur la diversité des genres dans toute production discursive un peu longue. Si tout locuteur est susceptible ou non d’user d’un trait donné, en fonction des situations et de ses interlocuteurs, alors c’est par la variabilité différentielle que le style prend une valeur.

Tous les traits de variation sont-ils toujours en cohérence dans un énoncé ? Ce n’est pas le cas : la variabilité apparaît omniprésente, même dans le vernaculaire, pourtant conçu comme un lieu de cohérence (Labov, 1972, Coveney, 2016). La cohérence apparaît comme une idéalisation au vu de deux types de faits.

Tout d’abord, un « même phénomène » peut être manié différemment par un même locuteur dans un même énoncé, comme en (45) pour le subjonctif ou (46) pour le ne de négation, constant objet de variation. Ainsi, dans MPF, le taux moyen de ne est très faible. Mais la plupart des quelques 230 locuteurs du corpus y ont recours au moins une fois : parmi les 95 enquêtes de MPF étudiées de ce point de vue, seules 6 ne comportent aucun ne (analyse effectuée par Amal Guha) :

(45)  Il faut qu’il vit il faut bien qu’il faut il fait fonder sa famille il faut que il nourrisse on va dire ses ses parents (MPF, Wajih5, 1950)

(46)  les Parisiens euh me disent mais tu n’as pas écouté les informations je fais ben non en venant à 7 heures du matin j’ai pas écouté les informations (exemple de Blanche-Benveniste, 2008 : p. 75)

De plus, un même énoncé peut receler des traits qui semblent relever de deux styles distincts, comme l’a établi Sauvageot (1969) avec l’exemple reproduit en (47) pour ils (ne) sont pas encore arrivés, prononcé en (a) et (b) par le même locuteur à quelques secondes d’intervalle. Parmi les 8 combinaisons en principe possibles des 3 traits ‘prononciation de il’, ‘négation’ et ‘liaison’, celles qui sont réalisées, relevées par Sauvageot, ne sont pas les deux qui pourraient être dites « cohérentes » :

(47)  (a) [insᴐ̃pazɑ̃kᴐrarive]
(b) [ilnәsᴐ̃paɑ̃kᴐrarive] (exemple de Sauvageot, 1969 : p.19)

En (48), une négation en forme longue côtoie la reprise d’un nom féminin par il ; en (49), la liaison assez recherchée [pazale] suit une relative de français populaire et une négation en forme courte ; et (50) atteste en un segment très court 4 formes différentes du pronom sujet féminin pluriel :

(48)  mais celles qui n’ont pas le permis ils doivent se débrouiller toutes seules (exemple de Coveney, 2011 : p. 73)

(49)  ceux [kizi] sont [pazale] (exemple de Gadet, 1998 : p. 631)

(50)  les meufs des fois il y en a qu’ils le prennent bien et [ε] rigolent avec nous quoi / mais d’autres ou elles disent rien ou [a] se cassent(exemple de Gadet, 2007 : p. 69)

Que ces alternances procèdent d’une autocorrection, d’une recherche de formulation, de variantes sans investissement, ou d’une autre cause, elles sont loin d’être rares : l’émetteur peut alterner deux formes, « sans qu’on soit en mesure d’expliquer la raison précise de cette incohérence à laquelle personne n’échappe » (Sauvageot, 1969 : p. 19) – voir aussi l’exemple montréalais (36) repris ici, où le même verbe est conjugué avec les auxiliaires avoir puis être :

(36)  dans un sens quand elle a parti, ça m’a fait plus de peine que quand mon père est parti (Montréal, cité par Sankoff & Thibault, 1977 : p. 94)

Si l’objectif est de comprendre comment le locuteur produit du sens, alors les alternances peuvent être signifiantes, comme le supposent aussi bien l’analyse de discours que, entre autres, Blanche-Benveniste (2010), Coveney (2011) ou Billiez & Buson (2013)… Ce que les usagers produisent ordinairement est fluide, instable, pas toujours prévisible : ils peuvent mélanger les styles, tout autant que, dans d’autres circonstances, il leur arrive de mélanger les langues.

3.2.3. Style et saillance

Les éléments variables n’ont pas tous un même potentiel catégorisateur. Ainsi, une négation en forme courte (V pas) passe assez largement inaperçue, du fait qu’elle est fort répandue et n’a en général plus de pouvoir stigmatisant – comme le montre l’étude de Sankoff & Vincent (1977) sur Montréal, où la raréfaction de ne est encore plus avancée qu’en Europe. En même temps, les facteurs déterminants peuvent être d’une grande subtilité qui risque fort d’échapper à un descripteur recourant à des catégories pré-établies (Guerin, 2017). Au contraire, une fausse liaison comme en (51), une forme comme il a s’agi (vs il s’est agi) ou un subjonctif imparfait morphologiquement incorrect (pour les rares locuteurs qui l’emploient) suffiraient à déclasser un discours ; l’absence de il dans (il) faut pas constituant probablement un cas médian (52) :

(51)  si vous laissez R un message je vous rappellerai dès mon retour (message sur un répondeur téléphonique, cité dans Gadet, 2007 : p. 65)

(52)  faut pas croire les élèves ils viennent avec des calibres en cours (cité dans Gadet, 2007 : p. 24)

La question du style oppose ainsi de sérieux défis à toute théorie à visée explicative, si elle veut dépasser des formulations essentialisantes ou banales en « différentes façons de dire la même chose ». Maintenant, pourquoi en va-t-il ainsi ?

Le variationnisme a conçu le style comme le produit d’une « autosurveillance sociale », plus ou moins pressante, qui inciterait le locuteur à se tenir à distance de son vernaculaire quand il y a pression de la norme. Cette conception a été critiquée par plusieurs linguistes qui l’ont jugée psychologisante et centrée sur le seul producteur, hors interaction. D’autres hypothèses sont souvent plus exigeantes sur le plan social. Ainsi, Bell (1984) reprend le modèle du sociologue Erving Goffman (1981) sur l’ajustement entre locuteurs en soulignant le rôle de l’interaction, en particulier celui du public visé par l’énonciateur (audience design). En suivant un présentateur de nouvelles qui se produit sur différentes chaînes de radio à Auckland (Nouvelle-Zélande), il a montré que ce journaliste ne parle pas toujours de la même manière, alors que le seul facteur situationnel qui se modifie est l’auditoire supposé de la chaîne. D’où sa théorie sur le style influencé par l’auditoire, réel ou supposé.


3.3. Peut-on expliquer la variation ?

Différentes hypothèses ont été avancées pour comprendre les ressorts de la variabilité, dans la perspective du système comme dans celle du locuteur. Il apparaît d’ailleurs que l’opposition établie en 3.1. entre deux orientations des sciences du langage est trop tranchée : elles sont complémentaires, du fait que les processus linguistiques et langagiers sont mis en œuvre par des agents locuteurs, ce qui suppose qu’ils s’en saisissent. L’attention des linguistes à un agent parlant n’est dès lors pas le fait de la seule perspective sociolinguistique située, mais d’un certain regard porté sur la langue. Ainsi, c’est un lexicologue-lexicographe, Alain Rey, qui a eu cette heureuse formule : « Aucune langue n’échappe à ceux qui l’utilisent » (1972 : p. 4).

Avec des points de départ différents, des perspectives relevant de la typologie, de la sociolinguistique, de la grammaire (et d’autres sous-disciplines – on aurait aussi pu parler d’acquisition) tendent à se recouper. Les approches sont ainsi souvent intriquées, les faits de variation pouvant être conçus selon différentes perspectives, dont nous ne prendrons que quelques illustrations sans rechercher l’exhaustivité. 

3.3.1. Des perspectives structurales et typologiques

Elles concernent des faits grammaticaux propres à une langue, soit spécifiques à un ou quelques lieu(x), soit panlectaux, et vont jusqu’à des caractéristiques typologiques concernant un groupe de langues – en l’occurrence, les langues romanes.

Un exemple d’hypothèse typologique a été donné par les travaux d’Ashby (entre autres, 1982), selon lequel le français parlé évoluerait vers un type distinct de celui du français standard et des autres langues romanes, par « dérive » (drift) vers « a topic prominent sentence type », qu’il illustre en particulier par des dislocations.

Toutefois, Blanche-Benveniste (2002) oppose à cette théorie qu’il serait hâtif de généraliser, compte tenu de la disparité d’ancienneté des traits avancés pour illustrer l’idée de dérive : certains sont loin d’être des innovations, comme les dislocations des sujets, « en place depuis plus de dix siècles » (p. 6 – aussi, Deulofeu, 1983, pour le même type d’objection).

3.3.2. Des perspectives cognitives

Les approches cognitives mettent en avant des tendances d’évolution comme la simplification, la neutralisation, l’économie, l’analogie, la transparence ou l’analyticité (l’emportant sur le synthétique), en suite à des travaux pionniers comme ceux de Bloomfield (1927) ou de Frei (1929). Pour qualifier ces phénomènes, Chaudenson et al. (1993) parlent de « processus autorégulateurs » qui s’exercent avant tout dans les échanges ordinaires oraux, quand la pression de la norme est faible. Ainsi, la préposition avec pas (= sans), qui illustre à la fois l’analycité et la transparence, se rencontre en différents points de la francophonie, bien qu’elle ait pu, en Amérique du Nord, être sentie comme un calque de without. Cependant, on la rencontre aussi sans qu’il y ait contact avec l’anglais, comme en (53) ou (54) :

(53)  l’hiver le monde a resté avec pas de pain ni rien du tout
(Iles de la Madeleine, exemple de Falkert, 2007 : p. 242 – un site québécois des moins anglicisés )

(54)  il est arrivé avec pas un sou (exemple de Chaudenson et al., 1993 : p. 25, qui l’attribue au « français populaire de France »)

Même si les tendances ne sont que rarement univoques, on voit souvent un alignement de l’ordre des mots, de l’interrogation indirecte sur la directe en (55), des pronoms sur les SN nominaux en (56) :

(55)  J’ai pas fait attention à c’était quoi les trucs et tout (MPF, Nacer4, 2150)

(56)  Son amie venait ici trouver ielle (Terre-Neuve, cité par Neumann-Holzschuh, 2009 : p. 53 = la trouver)

Le phénomène illustré en (56) n’est pas inconnu en France, mais c’est plutôt hors données courantes qu’on le rencontre, comme pour (57) ou (58) :

(57)  nous on n’a pas l’habitude, c’est pas notre langage, c’est le langage de elle (désigne alors une camarade d’un mouvement de tête – exemple de Billiez & Buson, 2013 : p. 136, émanant d’une enfant d’un groupe de 9-11 ans)

(58)  je vais regarder la photo de lui là (MPF, Nawal7, 191)

3.3.3. Des hypothèses communicatives

C’est sur le fonctionnement des interactions ordinaires que s’appuient les perspectives communicatives comme la hiérarchisation de l’information, qui peut concerner tous les vernaculaires : Filppula et al. (2009) parlent alors d’« universaux des vernaculaires » et Chambers (1995), de fondements des vernaculaires (vernacular roots).

Ainsi, en (59), la dislocation peut être décrite en macro-syntaxe ou par une hypothèse informationnelle :

(59)  Jacqueline / sa mère / la bonne / elle la lui refile (exemple de Gadet, 1998 : p. 612)

Les deux interlocutrices de (59) déploient les relations de Jacqueline par étapes. D’ailleurs, parmi les exemples pour illustrer les « universaux de l’oralité » chez Koch & Oesterreicher (2001), beaucoup concernent des dislocations qui hiérarchisent l’information – voir présentation de ces structures dans Berrendonner (2015)  > Notice   . Les détachements comme faits vedettes de la variation syntaxique à l’oral, c’est aussi le cas dans beaucoup des exemples de Culioli (1983), comme (60) ou (61) :

(60)  moi, le poisson surgelé, bof (exemple de Culioli, 1983 : p. 292)

(61)  moi, mon père, sa voiture, les freins i’ déconnent (exemple de Culioli, 1983 : p. 292)

Or, de tels exemples ne se rencontrent pas dans tout échange ordinaire et sont rares dans la plupart des corpus, car ils émergent surtout dans l’immédiat communicatif voire dans la connivence des interactants (Guerin, 2017), deux thèmes qui ne font pas l’objet d’une quête spécifique dans la majorité des corpus disponibles. Cependant, Wüest (2009) rappelle que ces formes étaient courantes à l’écrit au 17e siècle, ce qui ferait de leur tendanciel repli sur l’oral un effet de la standardisation (et d’une réallocation) plus que d’un processus cognitif ordinaire.

Parmi les effets de l’usage ordinaire in praesentia, Blanche-Benveniste (2010) use, à côté d’un métalangage grammatical volontairement minimal, de termes qui supposent un énonciateur en cours de formulation : plus que metteur en œuvre d’un système, le locuteur est chez elle producteur de discours. Nombre des termes dont elle use décrivent des processus qui mettent en jeu un sujet parlant (routine, effet d’attente, suspension, recherche du mot juste, continuité thématique…) ) qui ne parle pas tout seul. Mais, s’il s’agit bien chez elle d’agents locuteurs, actifs, ils ne sont pas situés sociohistoriquement : elle garde ainsi une stricte position de grammairienne, sans toutefois négliger ce que font les locuteurs quand ils parlent.

3.3.4. La sociolinguistique

L’explication sociale du changement linguistique est un thème récurrent de la linguistique du XXe siècle, par exemple chez Bloomfield (1927), pour qui les locuteurs du bas de l’échelle sociale cherchent à imiter ceux du haut. Une hypothèse complémentaire se rencontre chez Kroch (1978), pour qui les tendances naturelles de l’évolution des langues sont contrebattues par la recherche de distinction, les locuteurs soucieux de leur langue y résistant ; la norme en est la meilleure illustration.

Quant aux investissements de sens social (la signification que les usagers mettent ou perçoivent dans un usage), Eckert (2011) définit la variation sociolinguistique comme « a structured set of resources that speakers deploy both intentionally and automatically in their day-to-day practice » (p. 26), une définition qui prend acte de l’aspect double de la variation (système et agent) : ce sont les locuteurs qui font advenir la variation, mais c’est le système qui la permet. Son point de départ est dans l’agent social et ses ressources et elle laisse ouverte la question du degré de conscience de l’agent quant aux effets de ses choix langagiers ; il faudrait ajouter un rôle pour les idéologies langagières. À partir du matériau, souple, offert par le système, le locuteur négocie constamment de nouveaux investissements de sens social, processus qui risquent toujours d’échapper à un descripteur extérieur.

3.3.5. Un point de vue dialinguistique ?

On voit l’amplitude des possibles réponses à la question « Pourquoi y a-t-il de la variation dans les langues ? ». Question qui peut d’ailleurs être retournée : la variabilité étant présente dans toute entreprise humaine, pourquoi n’y en aurait-il pas dans les langues ?

Haugen (1972) avait proposé le terme dialinguistics pour qualifier le matériau variationnel comportant le stock de variations d’une langue : il le préfère à sociolinguistics afin d’éviter d’éventuelles identifications à la seule dimension sociale – mais il ne semble guère avoir été suivi, ni pour le terme ni même quant aux raisons de ce choix. Pourtant, dialinguistique permettrait en effet de sortir de ce que les étiquetages extralangagiers figent dans la variabilité.

Un point de vue similaire a été défendu par quelques linguistes, assez peu nombreux. C’est le cas de Cameron (1992), avec son sous-titre « Why language does not reflect society ». Pour Berrendonner (1983), « l’exploitation sociolinguistique des variantes est un phénomène partiel et secondaire ». Il regarde le « matériau variationnel » (1987 et 1988) du français comme un ensemble formel sur lequel interviennent des processus, des « stratégies d’exploitation » qui produisent « un ‘lecte’, c’est-à-dire non pas un dialecte ou un idiolecte mais un ingrédient pour de telles ‘parlures’ » (1988 : p. 48). Parmi les processus, les deux principaux sont sans doute la « sélection-généralisation », qui sélectionne une variante et une seule, où un item en vient à couvrir tout le spectre sémantique, comme, en (60), la généralisation de la forme longue (60 b) ; et la « spécialisation », qui assigne une spécificité à chacune des variantes possibles, par exemple en dotant chaque forme d’une valeur sémantique distincte, comme dans le cas de (61), que Blanche-Benveniste (1997 b, exemple évoqué dans plusieurs de ses articles) reprend de Tuaillon – voir aussi des exemples chez Frei (1929 : p. 87-8) :

(62)  (a) Fais-le sortir de sous la table
(b) Fais-le sortir de dessous la table (exemple de Berrendonner, 1988 : p. 48)

(63)  « S’il est malade, l’électricien […] dit Je vais au docteur : il a recours à lui. Si l’électricien va réparer une panne pour laquelle le médecin l’a appelé, cet électricien en bonne santé dit : Je vais chez le docteur : il n’a pas recours à lui. Telles sont les significations des tournures dans la conscience linguistique de ceux qui disent Je vais au docteur » (Blanche-Benveniste, 1997 b : p. 22)

Un point de vue dialinguistique permettrait de combiner les deux orientations des sciences du langage vers le système et vers l’usager, en ouvrant vers des formulations de linguistique générale, comme l’affirment aussi bien le titre de Simone (1991, « Why linguists need variation ») que la question de Berrendonner : « Pour quelle raison y a-t-il du ‘jeu’ dans la langue ? » (1988 : p. 50). Il répond qu’une certaine marge de manœuvre est nécessaire à l’usager en société afin de lui permettre d’atteindre des objectifs d’ordre pragmatique et vise à « accéder à des généralisations sur les structures fondamentales du comportement humain » (1987 : p. 48).

Pourquoi y a-t-il la « variation » dans les langues, plutôt que de la monotonie et de l’homogénéité ? Les hypothèses pour répondre à cette question relèvent pour une large part de la compréhension de nos sociétés complexes et de la façon dont les usagers font face à cette complexité, en s’ajustant entre eux dans leurs échanges ordinaires ou plus exceptionnels. Les ressorts de la variation dépassent ainsi l’ordre du linguistique, qui n’en est qu’une composante.

 


4. Remarques conclusives


La propriété consubstantielle à l’exercice du langage qu’est la variabilité ne peut être traitée comme venant « en plus » de l’essentiel qu’au prix d’un désintérêt pour les données qui s’écartent des exemples construits ou régulièrement repris dans les grammaires. Le premier apport d’une réflexion sur la variation est ainsi le désir de dépasser l’hypersélection des données pratiquée par la tradition grammaticale, en les diversifiant dans le temps, dans l’espace francophone et selon les genres discursifs.

La réflexion sur la variation conduit à soulever deux questions. La première est d’ordre pratique, elle concerne les données de sa langue auxquelles l’enfant est confronté lors de son apprentissage : elles sont forcément à la fois parcellaires et hétérogènes, mais c’est à partir d’elles qu’il devra construire son propre système et ses propres ressources langagières, par une sorte de « bricolage » personnel dont le sens social est pour lui à construire. Il y a donc à s’interroger sur les processus ainsi mis en œuvre. La seconde question, théorique, concerne le statut assigné aux observables : que faire des hapax ou des faits rares ? Comment les reconnaître ? Est-il possible d'en faire abstraction, comme il a longuement été de coutume chez les linguistes, enclins à viser les « régularités du système »? Ou alors, jusqu’où faut-il les prendre en considération, compte tenu du risque de se trouver devant une diversité défiant toute possibilité même de modélisation ?

Ce qui demeure ainsi un objet de recherches et de débats à propos de la variation, ce n’est pas tant sa localisation ni son fonctionnement (le comment), qui a fait l’objet de nombreux travaux dans les perspectives orientées vers le système. Ce qui reste à mieux comprendre et ne peut l’être qu’en tenant compte des usagers des langues, c’est ce que les humains font des ressources variationnelles que leur langue met à leur disposition : soit s’interroger sur le pourquoi de la variation (sa portée sociale). Or, les descriptions linguistiques, pour indispensables qu’elles soient, n’ont pas de puissance explicative. Aussi est-ce plutôt en observant les pratiques des locuteurs qu’il faut chercher à comprendre les usages variationnels – à condition d’accepter des arguments concernant l’agentivité des usagers des langues (ce qui, on l’a vu, n’est pas le cas chez tous les linguistes).

D’où la nécessité de réflexions sur le sens que les interactants accordent aux éléments « en variation » et les investissements qu’ils y mettent ou qu’ils y perçoivent. On met ici « variation » entre guillemets, car si l’on cesse de tabler sur l’invariant d’un sens intouché et d’un objet demeuré constant au-delà de ses changements de forme, on ne pourrait plus exactement parler de variation.

La variation, cette caractéristique incontournable des langues, intéresse tous les linguistes : le renouveau des réflexions sur ce champ est le produit conjugué d’un élargissement des sources de données et d’exigences théoriques issues de divers horizons, impliquant des approches, des requis et des portées distincts. Malgré son inadéquation, il n’est pas question de tenter de se passer du terme variation désormais bien implanté dans le paysage terminologique pour qualifier les propriétés fondamentales des langues en usage que sont la variabilité, la fluidité, la fluctuation, l’instabilité, ou l’hétérogénéité. Toutefois, afin d’asseoir solidement une réflexion à leur propos, il serait souhaitable de tenir à distance les connotations qui demeurent attachées au terme variation par la référence à du variable et de l’invariant.

 


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